Pierre Parlant : Danser comme on pense
Bourses d’écriture
On le sait, Nietzsche tient la danse pour une métaphore de la pensée. Elle est d’ailleurs pour lui rien moins qu’« une preuve de la vérité », et devient par là-même un critère d’évaluation de la teneur et de la qualité d’une œuvre : « Notre première question pour juger de la valeur d’un livre, d’un homme, d’un morceau de musique, c’est de savoir s’il y a là de la marche et, mieux encore, de la danse » (Le Gai savoir, § 366). Si cette métaphore s’avère convaincante, c’est parce que Nietzsche voit dans la danse ce qui permet à l’humain de s’élever, de se soustraire à « l’esprit de pesanteur » afin d’atteindre un certain degré de légèreté et de célérité en jouant avec le rythme et les déterminations de l’espace et du temps. Penser comme on danse devient à ses yeux le seul impératif qui vaille.
La recherche que je souhaite entreprendre au cours de cette résidence repose sur l’hypothèse de l’inversion de cette formule. Il ne s’agira plus de vouloir, du moins provisoirement, penser comme on danse, mais de comprendre ce que pourrait vouloir dire danser comme on pense, sachant qu’ici c’est l’« image de la pensée », pour parler comme Deleuze, c’est-à-dire tout le cortège des présupposés à partir desquels on désigne ce que signifie penser, qui risque d’être en jeu.
Ce travail de recherche vient en son ordre prolonger l’écriture d’Une cause dansée (Nous 2021), ouvrage composé à la suite d’une Mission Stendhal en Arizona, à propos du séjour d’Aby Warburg chez les Hopis et de sa réflexion sur « le rituel du serpent ».
Biographie
Né en 1957, poète, écrivain, agrégé de philosophie.
A notamment publié : Modèle habitacle, Le Bleu du Ciel, 2003 ; “Prenez le temps d’aller vite”, L’Attente/ Contrepied, 2004 ; Pas de deux, M.F., 2005 ; Précis de nos marqueurs mobiles, L’Attente, 2006 ; Le rapport signal bruit, Le Bleu du ciel, 2006 ; Mardi, j’ai commandé une ombre, Fidel Anthelme X, 2008 ; Les courtes habitudes, NOUS, 2014 ; Ciel déposé, Fidel Anthelme X, 2015 ; Qarantina, CipM, 2016 (traduction en arabe, Éditions Snoubar Beyrouth, 2016) ; Ma durée Pontormo, NOUS, 2017 ; Une cause dansée, NOUS, 2021