Alors qu’il est engagé dans des études littéraires et musicales, Alban Richard bifurque vers la danse avec la certitude d’avoir trouvé là son véritable mode d’expression et l’envie très vite de créer des spectacles. Il sera interprète pour des chorégraphes aussi différents qu’Odile Duboc, avec qui il travaillera de 2002 à 2010, Olga de Soto ou Rosalind Crisp…
Il fonde l’ensemble l’Abrupt, en 2000, pour lequel il crée plus d’une trentaine d’œuvres avec l’ambition affirmée d’inventer, à chaque nouvelle création, un nouveau corps, une nouvelle langue. Faisant œuvre de recherche, Alban Richard n’impose pas une signature gestuelle repérable entre toutes, une méthode, un style, mais expérimente à chaque nouvelle pièce, dans un rapport étroit à une partition musicale le plus souvent jouée en direct. Chaque projet s’ouvre comme un laboratoire érudit et sensible, creusant des questions structurelles et formelles à partir de la musique, de l’écriture et de la composition. Ne jamais reproduire, toujours repartir de zéro quitte à passer de l’expressionnisme, avec une pièce telle que Luisance (2008), à des objets plus abstraits tels que Breathisdancing (2017) ou Vivace (2018).
« Questionner les structures formelles musicales, les époques, les œuvres, entraîne forcément un regard très différent, affirme le chorégraphe. On ne danse pas pareil sur du Xenakis (Pléiades, 2011), sur de la musique médiévale (Nombrer les étoiles, 2016) ou sur du Arnaud Rebotini (Fix Me, 2018). L’endroit des flux, de la rythmicité, ou même de la technique corporelle, le rapport à la pulsation, au poids, tout cela doit être remis en question à chaque fois ».
Au terme d’un processus souvent long et dense, chaque nouvelle pièce s’impose d’elle-même comme un objet autonome, construisant sa propre logique, sa propre vie, sa propre organicité. Alban Richard élabore ses créations en relation avec différents collaborateurs, anciens et nouveaux venus, tissant ensemble différentes partitions – gestes, musique, lumière, costumes – et créant ainsi un échafaudage singulier. La façon dont il travaille avec les interprètes, dans une écriture au plateau nourrie d’improvisations contraintes, permet à chacun de développer sa propre danse à travers une présence active.
En dialogue permanent avec le monde musical, le chorégraphe collabore avec l’ensemble Alla francesca, Les Talens Lyriques, les Percussions de Strasbourg, l’Ensemble intercontemporain, l’IRCAM et les ensembles Cairn, Instant Donné et Alternance, ainsi que les compositeurs Arnaud Rebotini, Sebastian Rivas, Erwan Keravec, Jérôme Combier, Laurent Perrier, Raphaël Cendo, Robin Leduc, Paul Clift, Wen Liu, Matthew Barnson…
Chorégraphe prolixe, produisant plusieurs pièces par an, Alban Richard est régulièrement invité par des ballets et des compagnies à créer des œuvres de commande, tant à l’international (Canada, Lituanie, Norvège) qu’en France. Il intervient également en dehors des salles de spectacle – dans des lieux tels que le Louvre, le musée d’Art moderne de la Ville de Paris, le musée du quai Branly–Jacques Chirac et le musée Guimet – pour imaginer des performances in situ. Artiste curieux, touche-à-tout, Alban Richard considère son métier comme un artisanat qui se nourrit des rencontres et d’un questionnement au quotidien. Chaque nouvelle commande lui offre l’opportunité de chercher dans des directions inattendues, de découvrir, de rester lui-même en apprentissage.
L’ensemble l’Abrupt a été en résidence dans une dizaine de lieux (théâtre de Vanves, Centre national de la danse à Pantin, Forum du Blanc-Mesnil, théâtre Louis Aragon de Trembay-en-France, scène nationale d’Orléans, Prisme centre de développement artistique de Saint-Quentin-en-Yvelines, Chaillot – Théâtre national de la danse, théâtre Paul Eluard à Bezons, théâtre 71 à Malakoff) travaillant ainsi sur des problématiques et des contextes très différents.
C’est fort de toutes ces expériences menées en résidence, qu’Alban Richard prend la direction du centre chorégraphique national de Caen en Normandie en 2015, avec un projet fondé à la fois sur une démarche d’auteur et un travail en lien avec le territoire, autour de l’émancipation des publics.